Un article dans le Quotidien du Médecin sur l’installation du Haut Comité Médical d’Ile-de-France me fait réagir.
Une belle idée que je partage et qui m’inspire ces 3 réflexions:
1) Du point de vue moral:
Il y a nécessité à se saisir politiquerment des problèmes sanitaires parce qu’ils sont de plus en plus nombreux
et que l’Etat ne peut pas tout. Vieillissement, affections de longues durée, difficultés sociales sur fond de crise économique ont changé la nature des besoins. L’offre s’est sclérosée dans son carcan hospitalo-centré et figée dans la rémunération libérale à l’acte. Même si des dispositions législatives nouvelles sont en train de fendre la coque, c’est encore très insuffisant. L’équité en santé doit redevenir une priorité, la santé publique se poser en valeur universelle.
2) Du point de vue financier:
La région Ile de France joue hors catégorie. Avec 9 millions d’habitants, elle peut se permettre toutes les
audaces, elle peut être comparable à un Etat.
L’assurance maladie elle même aurait ses comptes équilibrés et ne serait pas en déficit si elle n’appliquait pas la péréquation nationale, pilier fondamental de notre système de solidarité nationale.
Inclure la recherche, à part pour valoriser le budget santé de 1 milliard d’euros sur la mandature, n’a pas de sens du point de vue sanitaire, sauf à donner à la recherche des objectifs de santé publique..ce qui est un autre débat.
3) Du point de vue de la faisabilité:
La création de ce Haut Comité – Instance consultative santé, créée par Conseil régional de l’Ile de France – et la mise à disposition de moyens financiers régionaux importants, ne suffisent pas à faire une politique efficace.
Pour améliorer la prise en charge des patients, nous savons que les ARS (Agence Régionale de Santé) auront besoin des conseils régionaux, et de leur capacité à faire le liens avec les élus et les associations sur le terrain. Nous savons qu’il ne faut plus être dans une logique descendante, car elle reste trop dans l’incantation. Il faut libérer de l’initiative locale, décloisonner et relier les acteurs de terrain, organiser la gradation des soins, innover les systèmes d’informations.
Une telle révolution organisationnelle ne peut être lancée sans mesurer les obstacles corporatistes. Les jeux de pouvoirs tant dans le corps médical, que dans les instances sanitaires, freinent ces évolutions.
Il faut aussi donner des objectifs de santé publique transectoriels, dans toutes les politiques : économie, alimentation, logement, transport, comme pour le développement durable.
Pour réussir, il faudrait que le Haut Comité bouscule les pratiques et soutienne des expériences de terrain qui améliorent le rendu sanitaire ; introduise de l’observation ou même de la recherche, par exemple en permettant un plus grand suivi des cohortes. A la recherche de la qualité par du bon sens et de la proximité, il faudrait ajouter les trés nécessaires indicateurs d’évaluation pour mesurer l’effcicience, comme sont en train de le faire d’autres pays et régions d’Europe tels que en Norvège, Suède, l’Algarve (Portugal) ou l’Andalousie (Espagne).
La région a des leviers pour agir sur la politique de santé. C’est plus difficile quant elle n’est pas aux commandes, mais néanmoins louable de le tenter. Pour réussir, elle devra veiller à ne pas refaire une politique descendante, et de favoriser les initiatives locales pragmatiques. Elle pourrait poursuivre son audace en innovant une stratégie de santé publique centrée sur l’efficacité perçue par le citoyen et se doter d’une stratégie inédite de santé durable.