L’indignation des Mutuelles est à la hauteur de l’injustice qui leur est faite.
Si l’on en croit Etienne CANIARD (1), porter de 3,5 à 7 % les taxes sur les mutuelles revient à faire peser 10% du plan d’austérité du gouvernement sur la santé. Alors il faut avec lui, dénoncer une taxe « injuste, incohérente et inefficace ».
Injuste, parce que l’effort va porter indistinctement sur tous les français, sauf les plus riches, aux très très hauts revenus, qui ne participent pas à l’effort collectif de mutualisation des recettes. Pendant ce temps, le nombre de français qui renoncent à prendre une mutuelle ne cesse d’augmenter. Les premiers ne côtisent pas parce qu’ils peuvent se payer n’importe quels soins, les seconds, ne côtisent plus, parce qu’ils ne peuvent plus se fournir à eux même cet effort protecteur.
Incohérente, parce qu’en provoquant une rupture supplémentaire dans l’accès aux soins, le gouvernement provoque une augmentation des dégâts sanitaires qui engendrera des surcoûts.
Inefficace, parce qu’au contraire de protéger les citoyens et de redresser les comptes de la nation, cette mesure aggrave la situation sanitaire, sans apporter de solution financière.
Chacun peut constater que la part du reste à charge des ménages ne cesse d’augmenter. En s’attaquant aux mutuelles, qui n’ont pas de marges de manoeuvres suffisantes pour absorber cette augmentation, le gouvernement s’attaque aux français les plus faibles et aux classes moyennes. Il ne faut pas croire que cette mesure soit seulement un coup de canif dans le budget des ménages, c’est un recul dans l’accès aux soins, et une aggravation des inégalités de santé.
« Le meilleur système de santé au monde » est devenu une contre-vérité. Si on compare nos résultats sanitaires à ceux des pays de l’OCDE, on fait moins les fiers! Avec une mortalité adulte des moins de 65 ans, de 200 décés pour 100000 hab (2) contre 180 pour les pays de l’OCDE, nous sommes sur la mauvaise pente.
Qui osera dire qu’avec un taux d’équipements et de professionnels des plus importants, ces résultats sont insuffisants et inquiétants?
Qui osera dire qu’il est pour le moins surprenant, qu’avec des dépenses de soins curatifs de très haut niveau, nous soyons rattrapés, en terme d’espérance de vie, par des pays bien moins dispendieux?
En tournant nos regards au delà de nos frontières, nous pourrions aller chercher des exemples de bonnes pratiques pour éclairer les professionnels et les décideurs sur des réorganisations en santé à notre portée.
A cet égard, les appels à projet de la Commission Européenne sur les Inégalités de Santé ou le Vieillissement doivent nous inciter à plus de créativité et d’innovation.
De nombreuses études ont fait la démonstration que des gains sanitaires et financiers sont possibles: pour cela, le rapport de Sir Mickael MARMOT (3) préconise d’agir sur les déterminants de santé: travail-habitat-alimentation-transport, et les travaux de Barbara STARFIELD (4) de cibler l’organisation des soins de santé primaire: accés-continuité-globalité-coordination. Il s’agirait de valoriser le rôle des médecins généralistes, pivot d’un travail collaboratif et pluri-professionnel, rendu possible grâce à des systèmes d’informations innovants.
C’est en agissant en profondeur sur l’organisation de notre système de santé que nous améliorerons la santé de nos citoyens. Il y va de notre responsabilité individuelle et collective pour rendre soutenable et durable notre système de protection sociale et de solidarité nationale.
Il ne faut pas taxer l’accès aux soins, il faut le réorganiser.
Solange MENIVAL.
1 : Etienne Caniard, Président de la Mutualité Française.
2: Pr Emmanuel Vigneron: 200 décés pour 100000 hab contre 180 en Europe, Les Inégalités territoriales de Santé, 2011.
3: Sir Mickael Marmot: Professeur Public Health université College London
4: Pr Barbara Starfield: Economiste USA, John Hopkins Bloomberg Scholl, décédée le 10 juin 2011.
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