Santé : l’égalité réelle grâce l’acte 3 de la décentralisation ?

L’accès à la santé est une enjeu d’égalité des citoyens face à la maladie. Les inégalités sociales sont en cause, dans les taux beaucoup trop élevés de mortalité et de morbidité, des plus défavorisés en France. Les réduire est un enjeu de santé publique, et d’égalité républicaine, dont devra tenir compte l’acte 3 de décentralisation. S’il ne le fait pas, il risque de miner et empoisonner notre contrat démocratique.

Qu’y a t-il de plus important que la vie et la santé de nos concitoyens ? Avec 205 décès pour 100000 habitants contre 180 dans les pays de l’OCDE (1) et 155 en Espagne ou au Portugal ( avant la crise économique ), on s’interroge sur nos mauvais résultats en mortalité prématurée ( avant 65 ans) ? Après avoir vaincu les maladies transmissibles, nous sommes entrés dans l’ère des épidémies de maladies non transmissibles. Ces maladies sont chroniques, elles sont liées à nos modes de vies et à notre environnement, à 80 % liées à notre alimentation. Il s’agit du cancer, de l’insuffisance cardiaque, de l’obésité, du diabète, de l’hypertension artérielle ou encore des problèmes de dépression et autres maladies mentales. Elles nous habitent plusieurs années, et s’ajoutent au fil de l’allongement de la vie, exposant le vieillissement à la multiplication des hospitalisations, que des mesures d’accès à la santé et à la prévention pourraient diminuer.

Nous avons besoin de réorganiser l’accès aux soins, non plus dans une relation médecin/patient/hôpital, mais patient/professionnels de santé-social/environnement. L’hôpital est le recours pour l’aiguë, il est sur-utilisé pour les maladies chroniques, faute d’avoir une vision globale du patient et d’avoir ciblé des politiques de prévention. L’approche innovante est celle qui va au devant de la population, prenant le temps de la prévention et de l’éducation thérapeutique.

C’est là qu’entrent en jeu les collectivités : la commune dans son rôle social, le département dans son rôle social et médico-social, et les Agences Régionales de Santé qui définissent les projets régionaux de santé en concertation avec elles. Malheureusement, notre culture hospitalo-centrée a du mal à se défaire de ses habitudes, d’autant que les formations des professionnels de santé, les portent davantage à prêter attention aux innovations technologiques, qu’aux innovations organisationnelles. Pourtant les enjeux de recherche et d’innovation sont considérables, ils sont un puissant levier de développement économique, sous-estimé, tant la santé est considérée comme le seul domaine des médecins et de l’Etat. Erreur. Les maladies ont changées. Nous devons changer d’organisation pour lutter contre les inégalités de santé. Nous devons travailler des schémas régionaux santé agissant sur la qualité de vie et l’environnement. Ils prêteraient main forte aux collectivités et aux Agences Régionales de santé. Les Conseil Régionaux, en charge de l’aménagement du territoire et du développement économique, pourraient déployer des réseaux de technologies (NTIC entre autres) et de services à la population, associés à de nouveaux programmes de recherche et de formations. En capacité, région par région, d’évaluer les ressources et les faiblesses des territoires, des infrastructures, des écoles et universités, ils pourraient bâtir des stratégies pour l’égalité d’accès aux soins et à la santé. Des schémas d’aménagement de la santé en région, ayant prise dans les territoires, en aidant les ARS à nouer des Contrats Locaux de Santé Globaux, ne pourraient que renforcer  l’égalité républicaine, la rendre réelle, plutôt que de la sublimer. Une vision globale stratégique permettrait d’identifier les causes des dépenses indues où inutiles, qui pèsent sur l’avenir de notre système de protection sociale. «Vouloir l’égalité réelle contrarie les orientations défendues par les promoteurs de la libéralisation de l’économie européenne et du démantèlement des systèmes de protection sociale.»nous dit Pierre ROSANVALLON (2).

La santé de nos citoyens est dans tout et l’affaire de tous. Elle ne peut plus simplement être cantonnée à l’affaire des médecins. Elle est partie intégrante de systèmes complexes où le Conseil Régional est un nouvel acteur, porteur de nouvelles légitimités : de cohérence territoriale, de formation, d’innovations sociales et technologiques, de développement économique, de développement et de santé durable. C’est dans ses stratégies sanitaires que l’Etat, qui se croit fort,  est le plus faible (3). C’est en pensant les nouvelles organisations de santé dans l’acte 3 de la décentralisation, qu’il peut reprendre des forces, alors qu’il a peur de les perdre. L’ Acte 3 de la décentralisation ouvrirait ainsi la voie de la confiance, celle qui re-mobilise les énergies des citoyens, des professionnels, des élus, éloignant ainsi les maux des populismes qui minent la démocratie, parce que renouant avec l’égalité républicaine.

Solange MENIVAL

1 ) Organisation de Coopérations et de Développement Economiques

2 ) « La société des Egaux » .

3) William DAB et Danielle SALOMON « Agir face aux risques sanitaires, pour un pacte de confiance ».

 

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