Santé, qu’est ce qui doit changer ?

Les maladies ont changé, les malades ont changé, les professionnels ont changé, mais le système de santé est resté bloqué sur le logiciel des trente glorieuses. En cette rentrée de septembre, les attentes sont fébriles pour savoir ce que décidera la Ministre Marisol TOURAINE. A La Rochelle, elle a affirmé que la ligne de conduite de sa politique serait la réduction des inégalités de santé. Des dépassements d’honoraires aux déserts médicaux, le ton est donné pour refondre l’organisation des soins primaires (1) et de proximité. L’enjeu porte sur les maladies chroniques, dont les malades aboutissent trop souvent et trop tard aux urgences de l’hôpital.  

Sans doute faudrait-il commencer par permettre au citoyen de se retrouver dans les méandres du système de soins, « trouver le bon soin, au juste coût et au bon endroit « (2). Pour celà il faut repenser la coordination des acteurs. Un chantier immense sur lequel planchait l’ANAP (3), ce week end à Strasbourg. A l’origine, un système libéral financé par des fonds publics, un paiement à l’acte inadapté au suivi des maladies au long court, une organisation non planifiée au nom de la liberté. Liberté de s’installer, liberté de choix du praticien. Sauf que les médecins ne s’installent plus, et que les malades voient les cabinets médicaux se fermer. Six médecins sur 10 déclarent souhaiter le salariat, 18 départements n’ont plus de médecins à moins de 15 km.

Repenser l’organisation des soins est une nécessité qui fait consensus, mais comment et  jusqu’où ? Chaque fois que l’on creuse une solution, on tombe sur une galerie qui s’effondre et il faut creuser encore plus profond. Le chantier est immense, il faut aller jusque dans ses fondements et penser d’abord à la réponse aux besoins de santé de la population. C’est là que la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé s’impose. Il faut repenser le parcours de soin, l’amener à devenir un parcours de santé,  et le territorialiser. Pour cela, un pilotage depuis Paris, pour une pays de 65 millions d’habitants, est impossible. Si un cadre national est une nécessité, l’égalité républicaine une exigence,  la mise en oeuvre fine ne peut être que coordonnée  en région. Le besoin d’ARS (4) renforcées ne fait aucun doute, mais pas seulement. Les initiatives locales doivent être repérées, encouragées et soutenues. L’aide des élus locaux doit être recherchée, et quant la demande s’exprime, elle doit être entendue. Au plus près de la population, ils connaissent ses besoins et complètent utilement par leur connaissance sociologique et anthropologique l’administration. Aucun changement organisationnel de l’ampleur qui s’annonce ne peut se faire sans les élus.

Il en est de même pour les hôpitaux. Ceux ci ne retrouveront le recentrage sur leur mission que lorsque les soins primaires seront réorganisés. Alors et seulement alors on pourra réduire la voilure inutile, ce qui ne veut pas dire fermer,  mais redéployer de nouveaux moyens, en particulier d’imagerie,  pour répondre aux nouveaux besoins. Rien de tout cela ne sera possible sans le décloisonnement et la fluidification de l’information par les  NTIC (5). La télémédecine  doit irriguer  l’expertise du CHU aux territoires, y confortant la présence des professionnels. Ce sont les innovations technologiques qui permettront les innovations organisationnelles.

Nouvelles organisations, nouvelles technologies et pourquoi pas nouvelle gouvernance ? La décentralisation de la mise en oeuvre organisationnelle était dans les esprits de cette université de l’ANAP. Bien que cette idée heurte beaucoup de hauts fonctionnaires, le constat est là :  la Région est le bon niveau de subsidiarité, plébiscité par l’OMS et l’Europe, et depuis peu, par de plus en plus de personnalités qualifiées en France. Capable d’insuffler le renouveau technologique, en charge des formations sanitaires et sociales, elle peut, par sa pratique de la contractualisation avec l’Etat, l’Europe, les institutions et les autres collectivités, être l’acteur dont a besoin le système de santé pour engager le changement et investir pour l’avenir.

 

1 : Les 4 piliers des soins primaires définis par le Pr B.Sarfield sont : l’accès, la continuité, la personne prise dans sa globalité, la coordination des soins.

2 : Pr Pierre Simon, président de l’ANTEL.

3 : Agence Nationale de l’Appui à la Performance.

4 : Agences Régionales de la Santé

5 : Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication.

 

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